TOPO SUR TOIS MÉTHODES CRITIQUES

     TOPO SUR TROIS MÉTHODES CRITIQUES


          Une méthode critique est un ensemble de propositions servant à unifier de façon logique des concepts afin d’expliquer et d’interpréter certains aspects de la réalité dont on cherche à rendre compte. Il existe différents types de méthodes critiques selon les objectifs des analystes ; chacune de ces méthodes a ses spécificités qui la différencient des autres méthodes ou au contraire les rapprochent d'elles. En réalité, aucune méthode d’analyse n’est totalement différente des autres. Les différentes méthodes présentent très souvent des points communs.


           LA SOCIOCRITIQUE


. La sociocritique est une approche du fait littéraire qui s’attache à ou s’appesantit sur l’univers social présent dans le texte. Elle stipule que toute production littéraire quoi qu’émanant de l’imagination créatrice d’un auteur, est nécessairement tributaire des circonstances historiques et sociales et économiques. Ce mot créé par Claude Duchet en 1971, propose une lecture sociohistorique du texte. Selon l’auteur, « l’enjeu, c’est ce qui est en œuvre dans le texte, soit en rapport au monde. La visée, de montrer que toute création artistique est aussi pratique sociale et partant, production idéologique ». La société existe avant l’œuvre, parce que l’écrivain est conditionné par elle, la reflète, l’exprime, cherche à la transformer ; elle existe dans l’œuvre, où l’on retrouve sa trace, et sa description. Selon Pierre N’dah, « la sociocritique consiste, de ce fait, en un constant va et vient du critique ou du chercheur du texte à l’extra-texte, tout en prenant comme référent le texte ». Elle s’intéresse avant tout à la façon dont les structures socioéconomiques s’incorporent dans les structures textuelles, en précisant cependant que cette incorporation n’est jamais directe ni automatique. L’intérêt du sociocriticien est de faire ressortir la socialité du texte. Pour Claude Duchet, « C’est dans la spécificité esthétique même, la dimension valeur des textes, que la sociocritique s’efforce de lire cette présence des œuvres au monde qu’elle appelle la socialité ». La sociocritique fait donc une lecture immanente du texte en le mettant en rapport avec le monde sensible, avec le texte.


      LA CRITIQUE THÉMATIQUE


       La critique thématique est une approche des thèmes dans un texte littéraire. Le thème est selon Serge Doubrovsky « la coloration affective de toute expérience humaine, au niveau où elle met en jeu les relations fondamentales de l'existence, c'est-à-dire la façon particulière dont

chaque homme vit son rapport au monde, aux autres et à Dieu [...]. » Le thème comme l’entend Serge Doubrovsky est à la fois, dans son affirmation et son déploiement, « le support et l'armature de toute œuvre littéraire ou, si l'on veut, son architectonique. » Dans le texte littéraire, le thème se caractérise par sa répétition, sa récurrence et sa variation. Pour Barthes, « le thème est itératif, c'est-à-dire qu’il est répété tout au long de l’œuvre [ …] il constitue, par sa répétition même ; l’expression d’un choix existentiel(…) ». Ainsi, le texte est un ensemble organisé de réseaux de thèmes. Jean Pierre Richard s’inscrit dans cette vision ; pour lui, « les termes majeurs dune œuvre, et qui en fondent l’invisible architecture et qui doivent nous pouvoir livrer la clef de son organisation, ce sont ceux qui s’y trouvent développés le plus souvent, qui s’y rencontrent avec une fréquence visible exceptionnelle. » Selon la critique thématique, le thème est un « signifié individuel, implicite et concret ; il exprime la relation affective d’un sujet au monde sensible ; il se manifeste dans les textes par une récurrence assortie de variation ; il s’associe à d’autres thèmes pour structurer l’économie sémantique et formelle d’une œuvre. ». La structure thématique permet au lecteur-critique d’accéder au sens du texte. Le choix des thèmes par un écrivain est un choix existentiel et traduit ses options idéologiques esthétiques, stylistiques. La critique thématique analyse les structures thématiques de « l’univers imaginaire » de l’auteur, l’on arrive à son « univers de pensée et d’écriture ». Le thème s’inscrit toujours dans un univers imaginaire avec d’autres termes. La critique thématique doit reconstituer le sens du thème à partir du sens des thèmes voisins antithétique


     LA CRITIQUE STRUCTURALISTE

         La critique structuraliste provient de la nouvelle critique et en est l’une des méthodes essentielles. Du point de vue de la critique structuraliste, le texte littéraire apparait comme une convergence de réseaux de structures. Le critique doit considérer le texte comme un nœud de réseaux de structures et doit l’étudier en tenant compte des relations que ces structures entretiennent entre elles. La structure est un « ensemble, système formé de phénomènes solidaires, tels que chacun dépend des autres et ne peut être ce qu'il est que dans et par sa relation avec eux ». La critique structuraliste s’intéresse à cette relation ‘’solidaire’’ qui existe entre les différents éléments dans le texte. Roland Barthes est le chef de file de cette ‘’nouvelle critique’’. Il a appliqué aux textes littéraires les procédés de l’analyse textuelle. De même, Gérard Genette a lui aussi appliqué aux œuvres littéraires (particulièrement aux récits) les méthodes d'analyse structurale qu'il emprunte à la linguistique structurale. Le sémioticien Greimas, avec sa Sémantique Structurale (1966) est également l’un des grands a développé la critique structuraliste. Notons que cette méthode intéressée fondamentalement par la structure est enfermée à l’intérieur du texte ; elle étudie les structures en elles-mêmes sans recours à des éléments extra-structures. Gérald Genette explique en ces termes :   

Toute analyse qui s’enferme dans une œuvre sans en considérer les sources ou les motifs serait donc implicitement structuraliste et la méthode structurale devrait intervenir pour donner à cette étude immanente une sorte de rationalité de compréhension qui remplacerait la rationalité d’explication abandonnée avec la recherche des causes : un déterminisme, en quelque sorte spatial, viendrait aussi relayer, dans un récit tout moderne, le déterminisme temporel de la genèse, chaque unité étant définie en terme de relation, et non plus de filiation.

La critique structuraliste est donc une lecture immanente du texte basée sur la relation entre ses différentes structures



          POINTS COMMUNS


       La critique thématique s’attache à étudier « les modalités concrètes d’un rapport au monde ». Elle étudie des éléments dans le texte ayant des sens que le sujet écrivain a à l’égard du monde, de sa société. Car l’écrivain appartient à une société d’où il puise le sens des thèmes inscrits dans son œuvre. Le sens des thèmes d’une œuvre relève de l’esprit de l’auteur, de son monde imaginaire ; ce monde imaginaire est construit par cet auteur à partir de ses goûts et dégoûts du monde, de la société. De fait, la critique thématique se rapproche de la sociocritique qui procède par un va et vient entre le texte et l’extra-texte. Aussi, la sociocritique est reconnue par sa nature de recherche de la socialité dans l’œuvre. Cette démarche nécessite l’analyse des thématiques et idéologies sociales dans le texte. Cela confirme davantage les affinités entre la sociocritique et la critique thématique.

     De même la critique thématique procédant par une « analyse textuelle et une démarche structurale », fait du texte un ensemble organisé de réseaux thématiques pour accéder à la structure sémantique du texte. Ainsi la critique structurale est-elle proche de la critique structuraliste. Il en va de même pour la sociocritique qui, s’intéresse avant tout à la façon dont les structures socioéconomiques s’incorporent dans les structures textuelles. « La critique structuraliste ou formaliste recherche, tout comme la socio-critique, dans l’œuvre des structures, des « formes ». Il ya donc bien une certaine affinité entre ces trois méthodes d’analyse étudiées.


DIGBE, Tato Érick

#dixfoisgbe




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